La QVCT appliquée aux fonctions commerciales

Romane Bioulac

22 juin 2022

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Depuis quelques années, la QVCT est devenue un des sujets prioritaires pour les fonctions RH et les managers d’équipes. Accentués par la crise sanitaire et le télétravail massif, les discussions et accords autour de la qualité de vie et des conditions de travail se multiplient dans les organisations.

Cependant, si de nombreuses actions sont facilement applicables dans la vie au bureau, qu’en est-il pour les fonctions commerciales qui se retrouvent parfois soumises à un stress important hors des locaux ?

Dans cet article, nous allons revenir sur les fondements de la QVCT et ses applications au sein de vos directions commerciales.

La QVCT, un nouveau nom pour de grands enjeux

Le 31 mars dernier, la QVT a changé de nom pour devenir la QVCT. Si cela peut paraître anecdotique à première vue, ce nouveau nom reflète une véritable prise de conscience sur les dérives de la QVT.

Aujourd’hui, de nombreuses entreprises prônent la QVT comme valeurs fortes de leur marque employeur sans avoir bâti des fondations solides dans ce domaine. Babyfoot, canapé, encas, machine à café flambant neuve ou autres actions bien marketées ne sont pas les valeurs de la QVT.

Ce qui pourrait s’apparenter à du greenwashing en matière de RH et de management commence déjà à se retourner contre l’expéditeur, notamment avec le scandale du compte “balance ta start-up” apparu sur instagram en 2021.

Quels sont les enjeux de la QVCT ?

Souvent pensée pour répondre à des besoins périphériques au travail en lui-même, la QVCT ne répond pas toujours aux enjeux fondamentaux. Pour rappel, voici la définition de la QVT proposée par l’ANACT lors de l’ANI de 2013 : “Les conditions dans lesquelles les salariés exercent leur travail et leur capacité à s’exprimer et à agir sur le contenu de celui-ci déterminent la perception de la qualité de vie au travail qui en résulte.” Pour aller plus loin dans la réflexion, voici les différents enjeux couverts par cette démarche :

  • l’amélioration des conditions de travail : les outils mis à disposition, l’environnement physique, technique et organisationnel, la formation, la mobilité interne, l’égalité, la communication interne, l’équilibre de vie, le temps de transport, la santé…
  • permettre à chacun d’agir et de s’exprimer : droit à l’erreur, autonomie, intelligence collective, reconnaissance, définitions précises des objectifs, feedback, dialogue social, résolution des problèmes, travail en équipe, groupe d’échanges…
  • la nature et l’essence même du travail : autonomie, maîtrise et gestion de son travail, mobilisation des compétences, développement personnel, pilotage et suivi de la performance, répartition du travail, sens…

Cependant, il est également possible d’étendre les applications à des enjeux plus larges comme les enjeux sociaux (handicap, âge, diversité…) ou encore de marché (évolutions des technologies, besoins clients, concurrence…) en accordant de l’importance à l’innovation.

L’état des lieux de la santé des fonctions commerciales

Avant de s’intéresser aux actions à mettre en place, il est primordial de dresser le diagnostic pour agir de manière réaliste et objective. Conditions de travail, pression, stress, objectifs, où en sont les fonctions commerciales ?
En effet, les métiers du commerce sont soumis à de nombreux facteurs de stress :

  • la relation client et les interactions sociales
  • les objectifs et la performance
  • la confrontation aux refus
  • la compétitivité du milieu de travail
  • les déplacements et l’organisation

Selon une étude menée par la fédération des Dirigeants Commerciaux de France et Malakoff Humanis, 48% des dirigeants commerciaux travaillent plus de 45 heures par semaine. Un métier exigeant en termes d’horaires de travail qui augmente fortement les risques psychosociaux pour ces fonctions.

Toujours selon cette même étude, 84% des commerciaux interrogés estiment que leur travail est épuisant nerveusement et demande de travailler de manière rapide et intense. 70% d’entre eux affirment consulter leurs boîtes mail professionnelles le soir et le week-end.

13% ont exprimé consommer des boissons alcoolisées tous les jours, soit 2 fois plus que dans les autres secteurs interrogés.

Ces facteurs de risques expliquent en grande partie le nombre d’arrêts pour raison psychologique. +14% en 2021 dans le secteur du commerce, selon le baromètre annuel Absentéisme Maladie réalisé par Malakoff Humanis. Avec 22%, ce secteur prend la deuxième marche du podium derrière le secteur de la santé à 23%.

La QVCT pour agir durablement

Si des actions ponctuelles sont mises en place ponctuellement pour soulager les fonctions commerciales, seule une véritable volonté de changement sera efficace sur la durée. Pour assurer la pérennité de votre démarche QVCT, il est nécessaire de suivre quelques étapes :

  • définir le cadre et la conduite de projet avec les fonctions stratégiques et sensibiliser les collaborateurs
  • dresser le bilan des enjeux à aborder ainsi que des besoins et des difficultés de vos équipes commerciales
  • mettre en lumière les axes prioritaires et les référents de projet
  • réfléchir collectivement à des solutions de remédiation, à la mise en place de processus et aux besoins de formation
  • inscrire la démarche dans le fonctionnement de l’entreprise au travers d’outils, de documentation interne et d’accords.
  • suivre et mesurer les retombées des actions déployées pour pouvoir ajuster et pérenniser la démarche.

Des exemples d’actions applicables aux fonctions commerciales

Entente et collaboration

Au sein des équipes commerciales, il n’est pas rare que la mauvaise ambiance règne. La cause ? Des objectifs individuels qui galvanisent la compétitivité entre vos commerciaux. Sur la durée cette situation peut devenir pesante pour le moral et le bien-être des certains collaborateurs. Pour cela, il est possible d’agir sur l’entente et la collaboration à travers diverses actions :

  • un bonus additionnel commun basé sur la performance collective
  • créer une nouvelle organisation qui permet de capitaliser sur les forces de chacun pour grandir en équipe
  • réaliser des challenges en mixant les équipes. Par exemple : un commercial sédentaire de l’équipe A avec un commercial terrain de l’équipe B
  • proposer des sessions d’échanges de bonnes pratiques
  • instaurer des parrains pour accompagner les nouveaux commerciaux

Ecouter et soutenir :

En votre qualité de manager, il est important d’être présent pour vos équipes et d’autant plus sur des métiers itinérants. Si l’autonomie est un besoin important chez les commerciaux, se sentir soutenus et écouter permet de réduire le niveau de stress. Il faut donc instaurer une confiance mutuelle entre vos équipes et vous pour permettre d’ouvrir le dialogue. Cela passe par :

  • une acceptation et une compréhension des difficultés de vos commerciaux
  • faire preuve de transparence et d’honnêteté dans le discours
  • d’être régulièrement au contact des équipes et de la réalité du métier
  • apprendre à faire confiance et à déléguer
  • prendre le temps d’expliquer et accorder le droit à l’erreur

Encourager la déconnexion :

Depuis l’arrivée massive du télétravail, la déconnexion est devenue de plus en plus difficile et en particulier pour les fonctions commerciales. La distinction entre le temps de travail et la vie personnelle est mince depuis que la maison représente aussi le bureau. Pour cela, il est du devoir du manager d’accompagner les équipes dans la déconnexion. Vous pouvez :

  • faire signer une charte qui stipule les bonnes pratiques concernant la déconnexion
  • fixer ensemble un horaire limite pour l’envoi de mail, slack, sms, appel ou toute autre notification
  • instaurer une routine en télétravail comme un message d’encouragement le matin et souhaiter une bonne fin de journée le soir. Cela permet de fixer un cadre clair
  • s’assurer que chaque collaborateur joue le jeu et être le premier à montrer l’exemple

Vous l’aurez compris, la QVCT n’est pas un sujet de surface à prendre à la légère. Cela doit être un pilier constitutif de votre culture d’entreprise et de votre fonctionnement interne. Au-delà de la marque employeur indispensable pour recruter les meilleurs talents, cela doit également être au service du travail bien fait. En réunissant les conditions de travail idéales, vous offrez la possibilité à vos équipes de donner le meilleur d’eux-mêmes.